Brexit : La Région Occitanie mobilisée pour accompagner les entreprises

En Occitanie, l’aéronautique, ainsi que les secteurs agroalimentaires et viticoles, sont impactés par le Brexit. La Région Occitanie et Ad’Occ se mobilisent : arsenal d’aides, webinaires par secteurs et veille continue des bureaux à Londres et Bruxelles.

Le Brexit ayant pris effet le 1er janvier, les demandes d’informations affluent. Signe de la fébrilité du monde économique régional commerçant avec le Royaume-Uni, le webinaire, organisé mi-décembre par Ad’Occ et la Région Occitanie, avec la DRDDI et Team France Export, sur le thème « Brexit et les entreprises » a attiré quelque 300 participants.

Alors que le contexte réglementaire est mouvant, des séances sectorielles se tiendront courant 2021 et en 2022, pour tous les secteurs exposés aux réglementations (lire ci-contre) : vin, agroalimentaire, santé, aéronautique… Un arsenal informationnel et actualisé nécessaire, car les relations commerciales avec le Royaume-Uni seront plus difficiles, avec le rétablissement des formalités douanières et de transit ou celui des contrôles sur la TVA, la fin de la libre circulation des capitaux, des marchandises, des services, des personnes et de la liberté d’établissement etc.

Conseil prioritaire si vous développez du business en Grande-Bretagne : déterminer rapidement les solutions les plus adaptées, informer vos partenaires et mettre en œuvre les changements nécessaires (systèmes d’information, contrats, ressources humaines, logistique, production, achat/vente…).

« Le Brexit n’est pas la fin d’un monde, c’est le début d’autre chose. Un accord-cadre a été obtenu in extremis, mais il reste des modalités à préciser dans chaque secteur d’activité », tempère Frédéric Faivre, chef de projet Brexit au sein de l’agence Ad’Occ. Une période transitoire de six mois s’ouvre, le temps que les services douaniers se mettent en place.

Le bureau de Londres, outil de veille du Brexit

Les bureaux d’Ad’Occ basés à Londres apportent une information en temps réel. « Ils s’éloignent de leurs missions traditionnelles (promotion-prospection pour le secteur viticole sur le marché britannique) pour effectuer une veille permanente sur le Brexit », explique Jean-Marc Dessapt, directeur opérationnel International - Conquête des Marchés à Ad’Occ. Un travail très utile, qui porte sur les barrières non tarifaires (normes, autorisations d’accès au marché, marquage CE valable dans l’UE et pas forcément au Royaume-Uni…), sur les divergences réglementaires entre le droit économique de l’UE et les nouvelles lois, et sur les normes et certifications que prendra l’administration britannique, maintenant qu’elle est autonome. Cette dernière va en effet produire de la norme, « et il y aura des divergences, dans la santé, l’aéronautique, l’automobile, l’agriculture ou la viticulture, des secteurs très réglementés ou soumis à des certifications, conclut Jean-Marc Dessapt. Les flux entrants et sortants vont se compliquer progressivement. Nos deux antennes, à Bruxelles, siège de la commission européenne, et Londres, sont mobilisées pour être en capacité d’aider et d’informer nos PME dans les années à venir. »

La Région Occitanie propose plusieurs aides pour la stratégie exports. Dans le domaine des dépenses éligibles immatérielles : Pass Relance Export, Contrat Relance Export ou Contrat Grand Export. Ainsi que des aides spécifiques dans le secteur agro-viti : Pass Agroviti dynamique, Contrat Relance Viti et Contrat AgroViti stratégique.

Deux témoignages en Occitanie

Dans l’aéronautique : Alain Alberido, responsable Brexit d’Airbus

Airbus est habitué aux changements de réglementation

« Il y a désormais une frontière entre la Grande-Bretagne et l’Union européenne. Un point final est mis à la libre circulation des biens et des matériels. C’est ce qui change. Pour tout le reste, les réglementations s’alignent. Dès le 4 janvier, les transports en Beluga ont repris pour Airbus commercial aircraft et toutes les autres activités pour Airbus Helicopters et Airbus Defence and Space à Labège, et également pour nos fournisseurs.

Entre les ailes des avions Airbus produites à Broughton, et les équipements pour les satellites assemblés à Labège et produits à Stevenage et Portsmouth, nos liens avec la Grande-Bretagne sont forts. Nous y comptons plusieurs usines.

Les ailes affluent vers les chaînes d’assemblage de Toulouse et Hambourg. Nous avons livré en 2020, 566 avions, soit plus de 1.100 voilures. En matière de logistique globale, nous avions anticipé le Brexit et mis un niveau de stock du bon côté de la frontière. Nous avions également anticipé nos plannings.

Aujourd’hui, nous surveillons la situation de très près. Chaque jour, une réunion de 2h porte uniquement sur les flux logistiques liés au Brexit ! Dans le courant du 1er trimestre, nous prendrons une décision quant au maintien, ou non, des stocks de sécurité, et si oui, à quel niveau les maintenir. Nous évaluons l’impact du Brexit : documents, de douanes à l’export et à l’import, et tous les aspects légaux et réglementaires que nous surveillons afin de voir comment les choses évoluent. C’est une approche opérationnelle, tactique.

Les transports par Beluga ne sont pas impactés par le Brexit. Pour les transports par camions, nous intégrons les aléas, en les faisant partir deux jours plus tôt qu’avant le Brexit. Par exemple, pour un camion qui mettait deux jours avant le Brexit, nous prévoyons 4 jours à présent. Il y a moins de fluidité, c’est évident.

Aujourd’hui, les dispositifs réglementaires sont alignés. Il est possible que dans le futur, les dispositifs réglementaires évoluent séparément, mais c’est aussi le cas avec les Etats-Unis, ou l’Australie, la Chine ou le Japon…… Airbus est habitué à s’adapter aux changements de réglementation ! Les règles du jeu équitables contenues dans l’Accord de Coopération et de libre-échange empêchent la Grande-Bretagne de devenir un pays low-cost, un ‘Hong Kong sur Tamise’, ou un paradis fiscal. »

Dans la viticulture : Mathilde Boulachin, Domaines Pierre Chavin (vins bio et sans alcool, Béziers)

Nous nous retrouvons face à une concurrence mondiale

« Sur le marché britannique, les vins français se retrouvent à présent face à une concurrence mondiale. Nous rentrons frontalement avec les nouveaux pays producteurs : Argentine, Chili, Australie… Sans accord préférentiel, nous n’avons plus d’avantages particuliers sur ce marché, où l’offre se retrouve très concentrée, avec une forte pression sur les prix.

Avec le Brexit, la Grande-Bretagne devient comme un pays du grand export, avec des documentations spécifiques demandées, un rallongement des délais à la frontière.
Conséquence : une augmentation des coûts logistiques et des coûts de dédouanement. Au niveau des palettes, nous avions des accords d’échanges. Cela n’est désormais plus possible, ce qui signifie des surfacturations au client, ou des coûts supplémentaires pour les sociétés. Tout cela est synonyme de perte de compétitivité. Les metteurs en marché, dont nous faisons partie, devront réintégrer ces éléments dans leurs prix de vente.

Du côté de la réglementation, tout n’est pas encore très clair. Il y a beaucoup de revirements. Des négociations sont en cours pour les droits et les taxes. Des incertitudes planent sur les analyses spécifiques sur les produits bio.

Autre point de vigilance : les metteurs en marché britanniques ont beaucoup acheté, pour compenser les incertitudes liées au Brexit. Ces stocks vont devoir être écoulés. Qui dit surstock dit affaissement de la demande.

En résumé, la Grande-Bretagne reste un marché important, mais complexe, avec une vive concurrence, où il sera difficile de générer de la valeur ajoutée. Mais nous ne sous-estimons pas les débouchés, notamment sur le segment des vins sans alcool, où Pierre Chavin est très présent. »

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Les visages de l'économie n°9
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