Ma Verdier

« Je commençais l’ouvrage. Je traçais, à la peinture noire, sur la longueur d’une grande feuille, une ligne droite se terminant par trois points. L’ouverture était faite. Je ressentais l’espace du dessin et ma première dilatation.
J’ouvrais encore et remplissais des cahiers de traits. L’écriture impulsive, spontanée commençait à fouiller.
J’allais dans la forêt. Posée dans les couleurs changeantes et la lumière instable, je dialoguais avec elle. Elle m’appris le langage des éléments. Elle me donnait des messages d’amour, de paix et de joie. Je connus la terre. Je trouvais la source, les gestes de mes mains coulaient.
Pourtant, la lumière m’éblouissait. Traits par traits, non sans peine, je creusais vers d’autres profondeurs pour trouver les ombres.
Simultanément, dans un mouvement qui semblait opposé, je partais vers les plus hautes montagnes. Là-haut, avec l’aide des Dieux, je mélangeais mon sang à la terre. Le trait prenait corps. J’appris la clarté et l’union des contraires. La lumière circulait. J’écoutais le monde et prenais plaisir à saisir les sensations, les émotions, les perceptions du vivant. Le trait célébrait.Les couleurs, les formes, révélaient l’espace « entre ». Entre les rochers, les oiseaux, les arbres, les herbes et les ruisseaux. Le vide dense parlait.
Le trait libre, se tendait vers une origine, un langage avant le langage, une forme avant la forme, un lieu de transformations, de régénérescence et d’union.
Je persévérais, et ma réalité augmentait."